«Nous n’irons pas plus loin», te dit le capitaine
Trop d’obstacles aujourd’hui pour gagner l’horizon
Des baleines puises gmissent sur la grve
Leur sang couvre des bouches comme autant d’hameons
Comme autant de collines occultant l’horizon
De crtes insensibles l’adagio des plaines
«Je suis vraiment navr «, te dit le capitaine
Et tu sens qu’il dit vrai et qu’il a le cњur bon.
Ds lors la bouche vermeille d’une femme au harpon
Qui entre dans tes murs et saigne les baleines
Te fait des mois durant ddaigner l’horizon
Et lorsque tu le croises snober le capitaine.
Quand tu rentres chez toi, tu te dis qu’il fait bon
Le mensonge est partout infiltr? dans tes veines
Tant tu aimes goter au sang de la baleine
Qui d? borde des lvres de la femme au harpon.
Mais un jour sur ta manche tire le capitaine
Les yeux exorbits, il te dit: «Repartons «.
Il est temps de sortir du sommeil des reines
Car nul ne vous attend autant que l’horizon.
C’est Lob Nor qui t’espre, l’Inlandsis qui t’appelle
La Sierra Nevada qui la nuit crie ton nom
Et c’est la Grande Bleue qui rehausse le ciel
Chacun d’eux te rclame et t’offre l’horizon
Mais celui-ci t’chappe, stopp dans son lan
Par des sommets hargneux, des valles encaisses,
Des villes au cњur de pierre aux formes insenses
Vois, la barbe te pousse et ton pas se fait lent.
Et tu entends au loin les plaintes des baleines
Qui avant de finir sur la grve ont sans doute
Connu cet horizon don’t seul le capitaine
Espre encore pour deux que tu croises la route.
Mais un jour au silence qui monte aux alentours
Comme tes yeux se dcollent, tu sais qu’on t’a laiss?
Seul avec ton vieux rve don’t l’ombre est un vautour
Qui dessous tes haillons sent la chair s’asscher
Et comme en de lents cercles, il va pour t’entreprendre
Le dcor s’aplanit, les courbes se dfont
Tout se dgage, oui, sans doute las de t’attendre
C’est lui qui vient toi, il est l l’horizon